SartMonde n°61


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N °61                                                                                                                 Juin 2019

Numéro spécial

A l’occasion du 75e anniversaire

Du débarquement en Normandie

Tout au long de 20 siècles l’Europe a connu plus de 400 conflits de plus en plus meurtriers et à intervalles toujours plus courts. Tout en développant des sciences qui ont fait croître l’espérance de vie, durant 20 siècles l’Europe a semé la mort. Et voilà qu’après deux grandes guerres, qui ont fait quelque 80 millions de morts (!), cela fait maintenant 74 ans que l’Europe connaît la paix ! Etonnant ? Non ! Un choix.


Alors ce sartMONDE propose de rendre hommage à ceux qui, souvent au prix de leur vie, ont ouvert sur des plages normandes les portes de la paix à une Europe si terriblement belliqueuse.


A l’occasion de cet important anniversaire, faisons aussi œuvre de lucidité en prenant le temps de consulter le relevé ci-joint de ces innombrables conflits, invasions, révolutions et autres violences, qui ont sévi pendant ces 20 siècles, car les vieux démons sont toujours à l’affût.




Soulignons au préalable deux caractéristiques de cette Europe, à savoir :

  • qu’avec l’Asie, elle fait partie d’une seule et même masse continentale, la frontière qui les divise étant purement conventionnelle, et

  • que l’Europe est la région la plus découpée au monde, ce qui a offert des poches où se sont établies des populations de diverses origines avec des cultures bien typées. Cette diversité a contribué à sa fécondité, mais aussi aux conflits qui l’ont agitée.

RESUME DE CES CONFLITS :

Du Ier au Xe siècles

20 conflits

Au XIe siècle

17 conflits

Au XIIe siècle

13 conflits

Au XIIIe siècle

28 conflits

Au XIVe siècle

30 conflits

Au XVe siècle

36 conflits

Au XVIe siècle

47 conflits

Au XVIIe siècle

40 conflits

Au XVIIIe siècle

42 conflits

Au XIXe siècle

73 conflits

Au XXe siècle

62 conflits

Total

408 conflits


Ce qui attire l’attention c’est l’accélération des conflits majeurs à partir du XIXe siècle qui a connu la série de guerres dites Napoléoniennes et qui ont impliqué toute l’Europe, de la péninsule ibérique jusqu’au cœur de la Russie (Moscou).

Tout au long de ce XIXe siècle, le moteur des conflits est l’ambition impérialiste qui veut conquérir des territoires et asservir des peuples, sans pour autant oublier quelques tentatives guerrières d’union, telles que celles de Charlemagne.


Tout change au XXe siècle quand éclatent deux grandes guerres mondiales, celle de 1914/1918 suivie par celle de 1939/1945, toutes deux ayant pour origine l’Europe et qui ont causé quelque 80 millions de morts ! C’est une période où de grands progrès scientifiques vont de pair avec des œuvres de mort, celles des bombardements destructeurs, des camps de concentration, des chambres à gaz et d’autres moyens d’une extrême violence.


La première grande guerre (1914/1918) qui, de près ou de loin, a impliqué 72 pays, trouve son origine dans une situation très complexe provenant de la croissance démographique, des regroupements menant à la constitution d’Etats-Nations, des impérialismes, des alliances, les unes offensives les autres défensives car on a peur de ’’l’autre’’. Il y a la montée en puissance d’une Allemagne qui connaît une forte poussée démographique accompagnée d’un impressionnant développement économique. Bref, la poudre d’une situation très complexe était là, il suffisait d’une allumette, celle de Sarajevo !


Qu’en est-il de la seconde grande guerre ? L’Allemagne vaincue en 1918 se voit imposer des réparations et, surtout, gère mal ses finances en contractant de multiples emprunts. Puis vient la grande crise de 1929 et le chaos qu’elle déclenche à l’échelle du monde et qui atteint les pays européens, dont l’Allemagne où la situation, ajoutée à l’esprit de vengeance, est habilement exploitée par Hitler.


C’est donc une situation particulièrement complexe et mal gérée qui mène à la seconde grande guerre (1939/1945), une situation explosive où la mondialisation en marche accélérée rencontre des nationalismes revanchards.


Mais voilà qu’en 1945 la fin de la guerre débouche sur une situation encore plus compliquée qu’en 1918 mais qui, cette fois-ci, est gérée avec lucidité.


Alors, pas à pas, on décide de prendre le chemin de l’unité européenne. Au lieu de punir une Allemagne vaincue, on choisit de miser sur la réconciliation et on l’aide à se reconstruire. On s’unit pour faire face à la marée communiste venant de l’Est. Les pas pour structurer une paix durable commencent par la création de la Communauté Européenne du charbon et de l’acier, la CECA, pour, finalement, réunir 27 pays au sein de l’Union Européenne à la suite du Traité signé à Maastricht en 1993.


L’Europe se débarrasse ainsi de la résolution guerrière de ses problèmes pour entrer dans l’ère nouvelle des solutions communes. La peur fait place à la confiance. Après deux grandes guerres qui ont connu un interlude d’à peine 11 ans, voilà que nous jouissons d’une paix qui, fait exceptionnel, dure depuis 74 ans ! Ainsi nous commençons à payer l’immense dette que nous avons contractée envers tous ceux qui ont perdu leur vie dans nos multiples conflits, envers ceux qui l’ont sacrifiée en 1944 lors du débarquement sur les plages de Normandie.


Alors, surtout ne nous endormons pas sur leurs lauriers car une situation encore plus complexe qu’en 1939 est en train de naître. En effet :

  • Il y a les déséquilibres démographiques avec des pays ouest-européens vieillissants qui attirent massivement des ressortissants des pays est-européens. C’est ainsi que des médecins roumains viennent soigner les patients des pays de l’Europe de l’Ouest alors que leur formation a été payée par la Roumanie.

  • Persiste la différence entre les pays prospères et ceux qui le sont nettement moins.
  • Partout, y compris dans les pays les plus riches, la pauvreté gagne du terrain et les classes moyennes connaissent souvent un net déclin.
  • Le citoyen moyen est otage du fisc pendant que des entreprises multinationales, attirées au moyen de cadeaux fiscaux, évadent l’impôt sur des milliards de bénéfices placés dans des paradis fiscaux.
  • Les dirigeants européens sont trop souvent embourbés dans le court terme et n’œuvrent pas assez avec une vision de long terme de sorte qu’ils ne perçoivent pas la situation très complexe qui est en train de se développer et qui peut mener à une troisième grande guerre, oui, osons le dire, une troisième guerre qui, dans un monde globalisé, ne peut qu’être mondiale. Est-ce cela que nous voulons ? N’avons-nous donc rien compris ? Ces 74 années de paix nous ont-elles endormis ? Voulons-nous que nos enfants et petits-enfants doivent sacrifier leur vie en débarquant sur on ne sait quelle plage du monde ? Acceptons-nous que le sacrifice de ceux qui ont débarqué en Normandie n’ait apporté qu’un interlude au lieu d’une paix définitive ?
  • Il y a un Moyen-Orient qui est au bord de l’explosion (Palestine/Israël, Arabie Saoudite/Iran, etc) qui a besoin d’être apaisé par une Europe en paix.
  • Et voilà que des nouvelles divisions apparaissent (pensons au Brexit), avec des nouvelles peurs, des nationalismes et populismes renaissants (’’America first ’’, derrière des murs), des déséquilibres et d’autres facteurs encore, sont en train de créer une situation des plus complexes.
  • Les USA et la Russie cherchent à affaiblir l’Europe qui, avec ses 835 millions d’habitants, représente quelque deux fois et demi la population des USA et quelque 5,7 fois celle de la Russie ! L’Europe c’est presque deux fois les USA et la Russie réunis. Quel potentiel pour une Europe unie ! Mais aussi quelle cible quand elle est désunie !
  • Le changement climatique pose l’immense question de la survie de la planète, et donc celle de notre survie. Mais ne perdons-nous pas le contact avec le monde du réel qui nous entoure, absorbés que nous sommes par le quotidien, préoccupés par nos soucis immédiats, captés par nos smartphones, plongés dans la fiction des séries télévisées ?

Oui, ce début de XXIe siècle voit se développer la situation la plus complexe de tous les temps et, apparemment, nous n’en sommes pas du tout, ou pas assez, conscients.


Notre monde a besoin de la réconciliation du riche avec le pauvre dans un partage équitable des immenses richesses qui sont disponibles et dont on nous dit que 1% de la population mondiale en détient autant que les 99% restants…

La nature nous demande de nous réconcilier avec elle et nous lance de plus en plus d’avertissements avant de vraiment se fâcher.


A nous, citoyens, de décider car vivre c’est choisir, or, aujourd’hui, nous avons à notre disposition toute l’information et les analyses nécessaires pour nous permettre de faire des choix lucides.


Prenons les mesures nécessaires tant qu’il est temps pour prolonger
ces 74 années de paix !


Le bouquaincoin


« Sans accès à l’eau, il n’y a pas de liberté possible » nous dit Riccardo Petrella dans son Manifeste de l’eau pour le XXIe sièclepublié par Fides, 94 pages (petit format), +/- €12/13. A lire absolument tant le sujet est important !


« Mon dernier voyage » par Raoni le Grand Chef Indien d’Amazonie et Jean-Pierre Dutilleux, cinéaste et écrivain belge qui milite aux côtés de son ami Raoni. Publié par Arthaud, avril 2019, 239 pages, +/- €19. A lire car la forêt amazonienne est menacée or elle est un des grands poumons du monde.




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Bulletin mensuel - Editeur: Janusz Fedorowicz

Clos Max Wéry 6, Sart-Messire-Guillaume, 1490 Court-Saint-Etienne